Le sépulcre de San Damiano restauré puis présenté au Palazzo Ducale de Gênes du 11 mai au 25 août 2013.
Les décors de la Semaine Sainte, dont la production se développe à travers tout l’arc méditerranéen occidental entre le XVIIe et le XIXe siècle, forment un ensemble aujourd’hui largement documenté, principalement à l’initiative de la Soprintendenza per i beni storici, artistici ed etnoantropologici della Liguria, basée à Gênes. Les matériaux et techniques utilisés pour leur réalisation sont très divers en fonction des contextes. Communément nommés cartelami en Ligurie, en raison de l’utilisation du carton pour leur réalisation, ces décors éphémères sont généralement réalisés en Corse à partir de matériaux plus durables.
C’est le cas du sépulcre de San Damiano, composé de panneaux de toile peinte montés sur châssis, le tout assemblé sur une structure de bois, pour former un pavillon praticable à monter dans une chapelle latérale de l’église. On entre ainsi dans cet oratoire pour y contempler les scènes de la Passion. Ce sépulcre est daté de 1751, et aurait été réalisé par le peintre Giacomo Grandi, originaire de Milan, dont l’activité en Corse est attestée à partir de 1742.
Il était voici quelques années dans un état de dégradation avancé, conservé au même titre que d’innombrables décors dans des conditions plus que précaires. La perte d’usage de ces biens patrimoniaux avait en effet mené au cours du XXe siècle à leur oubli et à leur abandon progressif. Entièrement restauré en 2005, le sépulcre de San Damiano a été présenté au public en 2010 au musée de la Corse à l’occasion de l’exposition Les confréries de Corse. Il est conservé depuis lors dans les réserves du musée dans l’attente de la restauration de l’église de la commune de San Damiano. Cet édifice en effet, en raison de son état, n’est pas en mesure d’offrir à son sépulcre des conditions favorables à sa conservation dans de bonnes conditions.
Le Palazzo Ducale de Gênes a souhaité la présentation de cette œuvre à l’occasion de son exposition Il gran teatro dei Cartelami. La restauration de 2005 avait impliqué des interventions poussées, notamment sur les panneaux les plus dégradés. Ces parties d’une grande fragilité présentaient des soulèvements minimes de la couche picturale et nécessitaient avant de partir en exposition des interventions de conservation curative. Ces refixages et retouches ont été assurés par le restaurateur de peinture Philippe Lenzini.
Le tratteggio
La technique de la retouche en hachures, ou tratteggio, largement employée sur le sépulcre de San Damiano en 2005, a été mise au point afin de résoudre le problème de la restauration de peintures trop fortement dégradées et donc trop lacunaires. Laisser l’œuvre incomplète rend en effet leur lecture difficile ; à l’inverse, une remise en état complet implique en un sens une falsification de l’œuvre, puisque les parties originales ne sont plus distinguées de la reconstitution. Ainsi le tratteggio permet-il de résoudre ce dilemme, en mettant en œuvre des retouches en hachures verticales parallèles en harmonie avec l’image d’origine.
Soulèvements et refixage
Le soulèvement de la couche picturale intervient le plus souvent en raison de la variation climatique, entraînant un mouvement du support de la peinture. Dans le cas du sépulcre de San Damiano, la toile s’était résorbée et, étant plus souple que la matière picturale, avait engendré sur celle-ci des ruptures. Le refixage mis en œuvre par Philippe Lenzini a consisté à apporter un adhésif, en l’occurrence de la colle de peau, permettant de rétablir la cohésion de l’ensemble.